Mon compte-rendu sur La Rafle, un film de Roselyne Bosch

Je rédige un récit à la 1ère personne pour montrer ma compréhension de l’oeuvre.

J’assistais à un cour sur les poilus avec les autres infirmières, quand la directrice arriva avec deux jeunes femmes juives, infirmières comme moi. Elle nous demanda de les aider à s’enfuir par la petite cour si les allemands venaient à se présenter.
La vie était de plus en plus dure pour les juifs depuis que les allemands s’étaient emparés de la France le 22 juin 1940. Désormais, en cette été 1942, ils ont pour obligation de porter l’étoile jaune et n’ont plus le droit de fréquenter les endroits publics. Je trouve ça injuste et préférais comme c’était avant.

C’est le chaos à Paris mais lors de la remise de mon diplôme d’infirmière je me sens heureuse et légère comme une enfant.
Lorsque je me suis réveillée ce matin-là, je ne savais pas encore que ma journée serait un enfer. Cette nuit de 16-17 juillet, la police française, sous l’influence des allemands, a raflé à leurs domiciles 13000 personnes fichées comme juives. Ils les ont déportées, comme des personnes nuisibles, au vélodrome d’hiver.

J’ai était désignée, seule, pour aider le médecin qui essayait de s’occuper des milliers de personnes dans le besoin, entassées dans le vélodrome d’hiver, alors que 60 volontaires attendent dehors, mais ils ne veulent pas de témoins. Quand je suis rentrée dans ce vélodrome, 13 000 personnes étaient entassés comme des animaux, même pire, c’était horrible. Une odeur nauséabonde d’excréments et d’urine m’envahissait. Ils devaient faire leurs besoins là où il y avait de la place. Toute cette foule n’avait rien, pas de sanitaire, pas de quoi se laver, pas d’eau, pas de nourriture…

Ils ont même raflés dans les asiles, dans les hôpitaux. Les enfants étaient déshydratés, les bébés manquaient de lait…
Une infirmière m’expliqua que c’était le chaos, il y avait toutes sortes de maladies infantiles, des fous, ils n’ont pas tous le matériel pour faire des soins adaptés…

Tout à coup, un petit garçon entra dans la tente, et avec toute son innocence me demanda ce qu’il faisait là, pourquoi il n’avait pas le droit de sortir. Moi, ne sachant pas quoi répondre et ayant de la peine pour lui, lui dis que j’étais comme lui, que je ne savais pas non plus. Il m’a dit qu’il s’appelait Nono, que son frère l’attendait en dehors de la tente et que sa maman était à l’hôpital. Lorsque quelques minutes plus tard, une infirmière m’informa que sa maman était morte le matin même, un pincement au cœur me toucha pour ce petit garçon.

Le médecin avec qui je travaille est juif, son dévouement est immense. Je le vois lorsqu’ une jeune femme arrive, sans symptômes, avec seule excuse de vouloir s’enfuir. C’est à ce moment-là qu’il lui conseille d’aller voir le chef plombier qui sera le seul à pouvoir l’aider à s’évader. Et là, je me suis demandée : mais pourquoi lui ne le fais pas ? Alors après lui avoir posé la question, il me répondit : mais que feraient tous ces gens sans moi ?

Par sécurité, j’ai tenu à accompagner cette femme jusqu’à la sortie. Par chance elle réussit à s’évader. Si seulement ça aurait pu se passer comme ça pour tout le monde…
Je suis protestante et malgré tout je crois encore. Je n’imaginais rien de ce qui pouvait se passer dans ce vélodrome. Mais j’avais quand même reçu des instructions :
-garder le silence sur ce que je verrais ici ;
-de ne pas me lier avec les internés ;
-de garder mes distances ;

Après quelques jours passés au vélodrome d’hiver, tous les juifs ont été déportés au camps de Beaune-La-Rolande. J’ai pu les accompagner.
Je ne comprends pas ce que les allemands vont faire des juifs.

Nono me touche réellement, j’essaye de toujours lui donner de l’espoir.
J’ai écrit au préfet du Loiret, car ils n’ont presque rien à manger. Je me suis donc mis au même régime qu’eux, c’est le seul moyen de leur prouver que c’est insuffisant. Je lui décris la situation : la population incarcérée vit dans des conditions de mal nutrition et de manque de soin indigne de nos institutions, en 3 semaines en me mettant au régime des détenus j’ai perdu plus de 8 kilos, presque tout le monde est malade.

Je suis partie à la préfecture. Lorsque j’ai vu le préfet, pour qu’il me croie, j’ai fait un petit malaise et lui ai expliqué qu’il n’avait jamais répondu à mes lettres.
Grâce à ça nous avons reçu des madeleines, ce qui a redonné le sourire à tout le monde. Une joie collective s’est installée. On dansait, riait, pendant ce court moment la vie reprenait.
Un matin, brusquement, les policiers font lever tout le monde car ils vont partir du camp mais personne ne sait encore où, si ce n’est que c’est à l’est.
Je vois Nono qui vient vers moi, qui veut rentrer chez lui, qui me demande de venir avec lui, qui me montre le bijoux de sa maman qu’il ne veut pas que les policiers lui prennent. Je me sens perdue, j’ai tellement envie de l’aider, de le suivre et de lui donner l’amour qu’une mère ne pourra plus lui donner.

David, le médecin, cette personne à qui je tiens, me dit que c’est la fin, que j’ai fait tout ce que je pouvais et qu’il est temps de leur dire au revoir. Mais je ne veux pas les abandonner. Je regrette de ne pas avoir pu aider David à s’enfuir. Je me suis tellement attachée à eux.
Ils ont séparés les enfants des parents. C’est une séparation inhumaine. Ce que j’ai vu à ce moment-là, ces mères qui ressentent comme un arrachement au cœur, ces enfants qui pleurent, et ces pères qui crient contre cette injustice, restera à jamais gravé dans ma mémoire.

Au camp il n’y a plus rien, tous ces enfants sont dévastés. C’est déchirant de voir ça alors qu’ils n’ont rien fait pour mériter cela.
Ça fait 5 jours qu’ils sont partis en Pologne et nous n’avons aucune nouvelle.

Ce matin-là, un policier nous réveilla avec Nono et me demanda de préparer les enfants car ils s’en allaient. Ce pauvre nono était tots content car il allait retrouver sa maman. À bout, je fis un malaise, ce qui m’empêcha de partir avec eux. Le docteur m’annonça que c’était trop tard, qu’ils partaient pour être gazés, dans des camps d’extermination. La plupart des parents étaient déjà morts et ils ne veulent aucun enfants survivants.

Je n’arrivais pas à y croire, j’étais anéantie. Par espoir d’arriver avant qu’ils partent, je pris mon vélo pour les rattraper. Ils font partie de ma vie, de moi. Quand je suis arrivée c’était trop tard, ils étaient partis. Il ne restait plus que le doudou de Nono à terre, la dernière chose qui me restait de lui.

3 ans après, à Paris, chez moi, j’héberge plein d’enfants sans famille, pour leur offrir un avenir meilleur.
En cette fin de guerre, sont accrochées des milliers de photos identifiant les personnes mortes sous l’horreur d’Hitler.
J’essaie de trouver des personnes que je pouvais connaître, quand tout à coup on me demande C’est Joe, un des petits garçons dont je me suis occupée pendant la rafle. Je suis tellement surprise et heureuse de le voir vivant. Il n’a pas retrouvé ses parents mais par chance il a rencontré une bonne famille qui souhaite l’adopter.
Au loin j’aperçois la photo de la maman de Nono, portée par un enfant caché par cette affiche. Et là je m’approche, et je vois Nono derrière cette photo. Et là je m’effondre en le voyant avec son regard vide sans émotion à cause de la douleur qu’il a dû vivre. Je suis heureuse de le revoir mais je pleure tellement il m’a manquée. C’est une période de ma vie que je n’oublierai jamais, tout restera marqué.

Louane MOURET

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *